Nous avons procédé à une enquête en interrogeant des observateurs attentifs de la vie politique. Nous leur avons demandé de répondre à la question suivante :« Pourriez-vous procéder à une expérience mentale ? Supposons que les élections législatives de 2012 soient remportées par le Parti socialiste et ses alliés. Compte tenu de ce que sera, en 2012, la situation de la France et de l'Europe, et compte tenu de l'orientation probable de cet éventuel gouvernement : quelles sont, à vos yeux, les principales lignes du programme qu'il devrait ou pourrait mettre en œuvre pour la législature 2012-2017, ou les principales décisions qu'il devrait ou pourrait prendre ? »La plupart des personnalités interrogées ont bien voulu répondre, et nous sommes heureux de publier leurs réponses. Comme on le verra, et comme on pouvait s'y attendre, elles sont très différentes. Les opinions, les préférences, les prévisions des auteurs diffèrent. Nos lecteurs, nous l'espérons, apprécieront cette diversité. Ils admettront aussi que nous avons choisi cette hypothèse sans nous poser la question de savoir s'il fallait ou non la souhaiter. C'est une probabilité : espérée par certains, redoutée par d'autres, indifférente à plusieurs. Mais la réflexion politique consiste souvent à prévoir les conséquences possibles d'un événement probable et à tirer les leçons de ces éventualités. Réflexion utile car elle modère les passions des acteurs, les craintes ou les illusions des spectateurs.Nos lecteurs trouveront ainsi dans ces pages une analyse de la situation présente et future de la France. De là, ils réfléchiront aux politiques, celles que l'on souhaite et celles que l'on redoute. Nos lecteurs pourront ainsi suggérer aux électeurs et aux élus que la politique n'est jamais rien d'autre que l'art du possible. COMMENTAIRE La campagne électorale en vue de l'élection présidentielle a duré près d'un an de débats acharnés dans lesquels, pour la première fois depuis 2005, la politique européenne a enflammé les esprits. Les partis extrêmistes, dont aucun n'a franchi le cap du premier tour, ont pesé comme jamais sur le contenu des programmes des candidats. À gauche comme à droite, l'Europe et l'euro ont divisé, alors que l'inquiétude des marchés mettait en cause la volonté des Français de poursuivre la politique de rigueur et de réduction de la dette. Réélu président de la République le 6 mai, Nicolas Sarkozy semble, selon tous les sondages et pronostics, devoir perdre les élections législatives du mois de juin. L'Europe s'affole d'une application probable du programme du Parti socialiste intitulé "L'égalité tout de suite". Le président du Conseil européen, Herman van Rompuy, sollicité par plusieurs chefs d'État et de gouvernement, tente auprès des socialistes français une démarche personnelle qui prend la forme d'une lettre manuscrite à Martine Aubry, Première secrétaire du Parti. En voici la transcription.
Jean-Dominique GIULIANI, Lettre du Président du Conseil européen à Martine Aubry Le président du Conseil européen Paris, le 9 mai 2012 Chère Martine Aubry, C'est à la fille de Jacques Delors que je m'adresse personnellement. Aux...