La question que je voudrais poser se passe de préliminaires : que faire ? Question pour chacun et pour tous, question pour le solitaire comme pour l'homme associé. Poser la question : que faire ? c'est délibérer1. Nous délibérons des choses qui dépendent de nous et que nous pouvons réaliser2. Qui est alors ce nous qui délibère et qui réalise ? Nous ne délibérons pas sur toutes les choses humaines. Par exemple, remarque Aristote, aucun Lacédémonien ne délibère sur la meilleure forme de gouvernement pour les Scythes3. Je partirai de cette remarque du Patron. À partir d'elle nous verrons naître non seulement la science politique, ou la philosophie pratique, d'Aristote, mais aussi notre science et notre philosophie, notre science qui n'est pas vraiment politique, mais plutôt sociale, et notre philosophie qui n'est pas vraiment pratique, c'est-à-dire qui ne sait trop que faire avec la question : que faire ? Au lieu en effet de nous interroger sur l'action à faire, nous préférons expliquer ou comprendre l'action déjà faite, entièrement déterminée donc, ou alors autoriser une action à venir entièrement indéterminée mais incluse dans nos droits. D'un côté une science de l'action à faire ; de l'autre une science de l'action déjà faite, jointe à une philosophie de l'action autorisée. P. M.
Le Lacédémonien et les Scythes Aucun Lacédémonien ne délibère sur la meilleure forme de gouvernement pour les Scythes. La forme de gouvernement, le régime politique, est l'objet de délibération par excellence...