Création monétaire et dette publique

Jean Peyrelevade

N° 174 Été 2021

Article

La monnaie remonte au néolithique, d'abord unité de compte puis instrument de paiement dans des économies d'échanges. Très vite utilisée par l'ensemble des populations, elle a toujours été considérée par le pouvoir régalien comme l'un des instruments de son autorité. Invention nécessaire de la vie en société, elle est devenue progressivement une abstraction, dépourvue de matérialité et de valeur propre, une monnaie fiduciaire, dit-on, dont l'acceptabilité dépend de la confiance, critère pour le moins imprécis. Indispensable à la vie privée comme à l'action publique, elle peut être un facteur d'unité comme d'affrontement. Qui la crée, et en quelle quantité ? Pour quels besoins ? Avec quelle légitimité ? Pourquoi l'accepte-t-on ou, au contraire, décide-t-on de s'en défaire ? Ces questions, aussi vieilles que l'humanité organisée (donc de quelques milliers d'années), n'ont jamais eu de réponse claire. La valeur de chaque bien que nous produisons est mesurée par un outil qui n'en a aucune.

Si la monnaie est sans valeur intrinsèque, si elle ne coûte rien à fabriquer, grande est la tentation de la multiplier. Ainsi tente de faire l'État au nom de l'intérêt général, ou plutôt de la conception qu'il en a, ainsi peuvent le souhaiter des personnes privées en...